De la formation entre Nouvelle-Zelande et Europe au cockpit de l'A380. Recits et anecdotes d'un Pilote de Ligne.
2 Avril 2010
Pieds sur les freins, pleine puissance.
« T’s and P’s in the green, 2300 RPM, 100% Load »
Doucement, je relève le bout des pieds. L’appareil s’élance sur la piste.
« Speed is alive, we continue »
A 50kts, le manche vient légèrement en arrière.
70kts, rotation. Assiette à 5 degrés.
Les roues quittent le sol.
« Positive climb, Gear up »
Deux semaines plus tôt, je rentrais de Sydney et attaquais par 16 heures de cours théoriques, la phase VFR multi-moteurs.
On y avait appris le détail des systèmes qui composent le Diamond DA42 Twinstar ainsi que tout un tas de procédures spécifiques aux appareils multi-moteurs.
S’en était suivi plusieurs heures en simulateur dont quatre avec instructeur (les autres étant des « solos ») au cours desquelles nous travaillions aussi bien sur les opérations dites « normal » que sur les différentes procédures inhabituelles pouvant intervenir au sol ou en vol.
Aujourd’hui et pour la première fois, je me retrouve en place avant gauche d’un « twin ». Première fois aussi que j’annonce la rentrée du train d’atterrissage.
La sensation de placage procurée au début du décollage, lors de l’accélération de l’avion, a maintenant disparu et il est temps de commencer mes premières checks.
GFLAR (Après décollage), ATA (Montée), FTRAA (Croisière), me voilà maintenant à 140kts, en sortie de CTR.
Au programme de ce vol, essentiellement du General Handling (Maniabilité). Steep turns à gauche, à droite, décrochages dans les différentes configurations, prise en main du pilote automatique etc… etc…
Mon instructeur m’a également présenté une descente d’urgence que je réaliserais moi-même lors de mes leçons en asymétrie (un moteur coupé).
Train sorti, tout réduit, on pousse sur le manche. Assiette à environ 25 degrés « down » et la vitesse augmente jusqu’à Vne (194 kts). Limité par notre altitude, nous n’avons poussé que jusqu’à 170kt pour afficher un vario d’environ 6000 ft /minutes. Attention aux oreilles !
De retour sur Hamilton, je m’exerce aux premiers circuits.
C’est un peu différent des circuits dont j’ai l’habitude. Même en « slow cruise », avec 55% de charge, l’avion maintient 120 kts. Plus de rectangle donc, mais une forme ovale avec deux virages continus dont un entre la vent arrière et la finale.
Encore plus de checks (AFARA (Airfield Approach), FPLS (Pre-Landing), AGF (Final descent), GAF (Final safety check)) mais moins de temps (on va plus vite). Il est désormais primordial d’être en avance sur l’avion.
Dès le début de la vent arrière, l’ordre des actions doit être établi dans la tête et il n’est pas question d’oublier un item lors d’une check.
Le dernier cran de volets ne sortira qu’à 200ft AGL, altitude de décision, à condition que l’on soit sûr d’atterrir. C’est essentiellement pour préparer l’asymétrique. Sur un moteur, en dessous de cette altitude, il ne sera plus possible de remettre les gaz sans toucher le sol.
On m’a posé des questions sur la visibilité depuis l’avion et je dois dire qu’on sent que l’avion est destiné à l’IFR (l’anti-ice n’est pas là que pour faire joli. Nos Twinstar sont certifiés conditions givrantes connues).
Le tableau de bord est assez haut et les moteurs sur les côtés cachent la visibilité latérale.
Il suffit donc d’être conscient de ces « limitations » pour que tout se passe bien.
Dernière particularité, la masse maximale au décollage est différente de la masse maximale à l’atterrissage. C’est chose fréquente sur des avions plus gros mais pour moi, c’est tout nouveau. Il faut considérer un temps minimum en vol si l’on part au dessus de la MLM !
Tout une nouvelle philosophie à apprendre mais je suis confiant. Le DA42 est vraiment une superbe machine à l’instrumentation moderne (Garmin 1000). Que demander de plus ?
PS: Merci à Wil' pour les photos. Assis tranquillement à l'arrière, il a réussi à shooter avec mon appareil qui n'a pas une des prise en main les plus faciles.... surtout lorsqu'on n'a pas été briefé :)
Pilote de Ligne.
Ancien Cadet CTC Wings (formation en Nouvelle-Zelande a l'origine de ce blog)
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